Championne du WiFi il y a encore quelques mois, Hérouville-Saint-Clair, près de Caen, est partie en guerre contre les ondes électro-magnétiques. Au nom du principe de précaution, son maire, Rodolphe Thomas, s'est placé à l'avant-garde des élus locaux contre les opérateurs de téléphonie. Comme l'avait fait il y a un peu plus d'un an Courbevoie à la demande de "certains parents", l'édile MoDem a débranché le WiFi des écoles. Enfin presque. Car pour l'instant, une seule école sur les douze de la ville s'est vu retirer l'Internet sans fil. Pour les autres, le principe de précaution attendra encore un peu, le temps de trouver des solutions de remplacement efficaces, d'ici quelques semaines.
50 000 antennes-relais

A la faveur de ce coup d'éclat, cette commune de 24 000 habitants, qui a adhéré à l'association Robin des toits et au Criirem (Centre de recherche et d'information indépendantes sur les rayonnements électromagnétiques), pourrait devenir l'une des villes pilotes où serait testée une émission des antennes-relais à 0,6 volt/mètre alors que la réglementation, en France, permet aux opérateurs d'émettre jusqu'à 61 v/m.

Cette idée de villes-tests a été défendue, mercredi 6 mai, lors de la deuxième table ronde du Grenelle des ondes consacrée aux antennes- relais, par Robin des toits qui veut "prouver que c'est possible, contrairement à ce qu'en disent les opérateurs". A cette fin, l'association a obtenu l'accord de communes qui forment une sorte de panel urbain et rural : Hérouville, donc, et Courbevoie (Hauts-de-Seine), Niergnies, (Nord) où Orange veut installer une antenne contre la volonté de la majorité des 515 habitants de ce village - mais avec l'accord du propriétaire du terrain -, ainsi que trois villages des Cévennes (Le Vigan, Aumessas et Campestre), le panel couvre des territoires ruraux et urbains.

Accessoirement, cette expérimentation éviterait à Hérouville-Saint-Clair de régler la facture du diagnostic qu'elle entend faire dresser "par un organisme indépendant" afin de connaître les taux d'émission des antennes. Le devis - entre 4 000 et 5 000 euros - est élevé. Pour l'heure, la municipalité s'emploie à gérer avec doigté le retrait d'un réseau WiFi qu'elle a installé il y a cinq ans et à grands frais (15 000 euros).

Occupés à faire enfiler leurs manteaux à leurs petits, les parents d'élèves de l'école maternelle Lebisey d'Hérouville-Saint-Clair se félicitent de la décision. Dans ce petit quartier pavillonnaire, la plupart des parents des 69 élèves ont découvert l'existence de l'antenne WiFi - placée au-dessus du dortoir - en même temps que sa suppression. Il est vrai que la ville n'a pas choisi cette école par hasard : il s'agit d'une maternelle où seule la directrice utilise l'accès à Internet à des fins administratives.

Car l'opération "école sans WiFi" n'a pas pour but de priver les petits Hérouvillais de l'Internet à haut débit mais de présenter une image irréprochable de la commune. "Il fallait impérativement que l'on montre l'exemple", résume le maire qui, avec un sens aigu du tempo médiatique, a lancé son plan de bataille quatre jours après le lancement du Grenelle des ondes.

La préoccupation de la ville remonte à plusieurs mois. Sous l'impulsion de Laurent Mata, premier adjoint, chargé des finances, des ressources humaines et du développement durable, un petit groupe d'élus "s'investit" dans la question. Le jeune et unique élu Verts d'opposition, Raphaël Yem, est associé. "Très content, car cela faisait longtemps que les Verts portent le dossier", et il n'est pas dupe de la soudaine radicalité affichée par la mairie. "Ils découvrent la puissance médiatique du principe de précaution", ironise-t-il espérant que la municipalité "ne calera pas" au moment où il faudra qu'elle s'affronte aux opérateurs.

Cette heure n'a pas encore sonné mais Laurent Mata est "déterminé" à obtenir d'Orange, de SFR et de Bouygues Telecom, dont les antennes hérissent les toits de la ville, "des niveaux d'exposition les plus proches possibles des niveaux acceptables" et d'aller en justice "s'il le faut" et ainsi de "faire jurisprudence".

En attendant, le maire veut sensibiliser la population. Lui qui ne téléphone plus qu'avec une oreillette a prévu de lancer une campagne publique sur la nocivité des portables pour les enfants.
 
 
50 000 antennes-relais

Réseau. La France compte près de 50 000 antennes-relais pour 56,7 millions d'utilisateurs actifs de téléphonie mobile.

Exposition. Suivant les recommandations de l'OMS, la France a fixé les valeurs limites d'exposition du public aux antennes-relais entre 41 volts/mètre et 61v/m.
Le 8 mars 2007, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) a lancé un appel à candidature pour un 4e opérateur de téléphonie mobile. Free Mobile et Virgin Mobile ont déposé leur candidature.

 

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Guerre des ondes électromagnétiques : la bataille d'Hérouville (Le Monde du 7 mai 2009)

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